La retraite ? Paul Speckman n'y pense même pas,
capitaine au long court de ce vétéran de la Death Metal US dont il fut
historiquement un des fondateurs au milieu des années 80 et ce, quand bien son
premier effort est arrivé après ceux de Death, Morbid Angel ou Obituary. Master,
c'est qu'on appelle un référence, toujours là et au garde-à-vous, 23 ans après
un galop d'essai éponyme, important à défaut d'être légendaire. Désormais basé
en République Tchèque, Speckman se veut d'ailleurs plus actif que jamais,
enquillant les galettes à un rythme soutenu, diarrhée pestilentielle que l'âge
au lieu de freiner tend au contraire à
intensifier. Les vieux cons ne s'en plaindront pas, d'autant plus que Master
sans se bonifier à proprement parler à la manière d'un bon vin, maintient une
égale qualité, semence dont on pensait - à tort - qu'elle allait finir par se
tarir à l'image de celles des autres dinosaures du genre. Au final, entre un
Cannibal Corpse en sommeil, un Morbid Angel qui n'intéresse plus personne ou un
Deicide qui ne doit effrayer plus guère que quelques bigots, il ne reste
quasiment plus rien de cette première génération américaine du Metal qui fait
peur, hormis donc Master sur lequel on peut toujours compter. The Witchhunt,
son onzième album, le prouve à nouveau, concentré de brutalité velue au son
compact. Comme il prouve que c'est dans les vieux pots qu'on fait encore le
meilleur Death Metal, comme tendent à l'illustrer également tous les zombies
biberonnés aux mamelles suédoises. Old-school jusqu'au bout des doigts rongés
par la lèpre mais doté d'une vigueur qui nous ferait presque suspecter la prise
massive de Viagra par boîte de 12, Master reste fidèle à lui-même, rouleau-compresseur
bourrin et implacable, toujours capable de fulgurances. Elles sont ici au moins
au nombre de deux : l'ultra pesant "Another Suicide" dont le riff
sent le Slayer période South Of Heaven et "Raise Your Sword", emporté
en son milieu par une cadence infernale quif ait affleurer les racines Thrash
du combo. Dommage que le reste, par ailleurs d'une efficacité toujours
redoutable, se montre plus linéaire, sans surprises au point que la majorité
des morceaux paraissent tous fait du même tonneau, rapide et meurtrier, porté
par un Speckman à la voix caverneuse comme vieillie dans un fût de chêne. On
pourrait s'en plaindre. Ce que nous ne ferons pas vraiment car cela fait
tellement qu'on ne s'est pas pris une bonne vieille claque dans la gueule qu'on
accueille The Witchhunt avec cette chaleur bienvenue et retrouvée dans
l'entre-jambe. Les plus de 35 ans comprendront, nous qui crevions notre acné en
se passant en boucle ces vinyles de monstres en rut, dernière étape avant que
l'homme ne se change en bête... Master c'est un peu tout cela et son album est
à sa manière de morceau de passé, ce qui ne le rend ni anachronique ni
nostalgique juste intemporel et d'une puissance éprouvée. Que réclamer de plus
? Un bon disque. (La Horde Noire 2013)
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