Voilà bien un album qui ne devrait pas
faire que des heureux et encore moins l'unanimité chez quelques Ayatollahs
étriqués (pléonasme). En effet, après trois méfaits passés à ériger un black
metal taillé à vif conjugant rapidité fielleuse et précision chirugicale dans
son exécution, 1349 a décidé cette fois-ci de ne pas caresser ses fans dans le
sens du poil (de la bête). Certes Beyond
Apocalypse et surtout Hellfire témoignaient déjà, par l'entremise
de compositions plus travaillées et surtout plus longues, que ses géniteurs
n'étaient pas de ceux à considérer le genre comme inféodé à la seule brutalité
épidermique. Pour autant, on ne s'attendait pas à ça ! Mais le fait que les
Norvégiens, parmi lesquels on reconnaît bien entendu toujours l'exceptionnel
batteur Frost (Satyricon), ait recruté Tom G. Warrior, qui en connaît un rayon
en matière d'atmosphères putrides et mortifère, le définitif Monotheist (auquel on est bien obligé de
penser à l'endroit de cette quatrième offrande) de son Celtic Frost le prouve
avec effroi, aurait cependant dû déclancher en nous un signal d'alarme. Car
autant ne plus tourner autour du pot plus longtemps, Revelations Of The Black Flame,
nonobstant son incontestable réussite (j'y reviendrai) semble presque être
l'oeuvre d'un tout autre groupe que 1349. Alors qu'on était déjà prêts à tendre
la joue gauche, le groupe a remisé au fond d'un placard son metal à grande
vitesse (sauf sur quelques éclairs sauvages tels que "Maggot Fetus...
Teeth Like Thorns", dont la corrosivité irrite les muqueuses) pour lui
préférer un magma visqueux et d'une noirceur insondable dont la trame
instrumentale phagocyte des lignes vocales plus lointaines que dominantes.
Ecouter cet opuscule revient à s'abîmer au risque de se perdre dans les
profondeurs d'une mine qu'aucune lumière ne parvient jamais à atteindre. Les
Norvégiens serrent le frein à main et rampent désormais sur un socle érodé par
les coups de boutoir d'ambiances aux confins de la musique industrielle. Et
afin que personne ne se méprenne sur leur intention, ils prennent soin de poser
le décor dès les premières secondes via cet "Invocation" qui résonne
comme un cauchemar sonore avec son long cri d'aliéné en guise d'entame. Le
paysage y est étouffant, vicié. Effrayant. Encadrés par des instrumentaux
("Horns", "Misanthropy", plainte squellétique tout d'abord
seulement égrenée par un piano aux accents funéraires avant de peu peu muter
pour se fondre dans son implacable successeur, "Solitude" enfin,
interlude malsain et minimaliste) qui loin de faire du remplissage, participent
de la macération d'une croûte terrestre suintant de vibrations sourdes et
mafaisantes, de terminales pulsations constituent l'épicentre d'un gouffre
tentaculaire vertigineux. Si "Serpentine Sibilance" est une reptation
mid-tempo, plombée et déshumanisée, qui draine des effluves d'une négativité
absolue, le sentencieux "Uncreation", dont l'apparat est celui d'une décrépitude
fiévreuse, parvient à capturer l'esprit qui animait les Grands Anciens. Le
groupe y déverse avec largesse un climat poisseux qui vous colle aux tripes et
vous envoûte autant qu'il vous irradie de sa noirceur charbonneuse et
infernale. La dernière marche vers ce monde rongé par les flammes des abysses
est atteinte, du moins le croit-on, avec l'abominable "Set The Controls
For The Heart Of The Sun", reprise ahurissante d'un vieux standard
psychédélique de Pink Floyd époque Syd Barrett et bouillie brûlante où
crépitent des relents ambient tandis que des martèlements ancrent le tout dans
un substrat granitique. Le croit-on, oui car Revelations
Of The Black Flame, bande-son cent fois plus vicieuse que bien des crachats
bêtement sataniques, est en fait une course en avant vers le néant. Au bout de
la route, incarnée par le monumental "At The Gate...", il ne peut y
avoir plus aucun signe de vie.... Humaines. 1349 vient quasiment d'offrir une
réponse au Ordo Ad Chao de Mayhem. Tous ne s'y
retrouveront pas... (cT2009)
Black Metal | 44:53 | Candlelight Records
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