L'éclectisme, c'est bien pratique. Prenez
le cas par exemple du dénommé Ryan, que personne de connaît mais dont l'esprit
d'ouverture lui permet aussi bien de promener sa carcasse dans les marécages du
death/grind avec Bitch Hunter (qu'il a quitté), d'exalter les forces des
ténèbres avec le blackeux Hordes Of The Morning Star et même de racler riffs du
drone tendance sludge avec Normpetersen ! Pas mal quand bien même il n'y a pas
de quoi fouetter une none avec ces divers projets. C'est pour cette raison que
l'on attendait pas forcément grand chose de The Howling Void, son joujou à lui
tout seul grâce auquel l'Américain peut se frayer un chemin dans les méandres
bien ravinées depuis quelques années du funeral doom. Et pourtant, son premier
essai sous cette bannière, Megaliths
Of The Abyss s'impose d'ors
et déjà comme une des marches funèbres les plus belles composées depuis des
lustres. Vous aimez comme le chant résonne comme un écho lointain et caverneux
? Vous aimez lorsque les guitares se drapent dans des atours sentencieux ? Vous
aimez les lentes descentes au fond d'une mine de charbon qu'aucun rai de
lumière ne vient jamais réchauffer ? Alors cette ode crépusculaire et vaporeuse
vous est destinée. Et on se moque bien que son auteur n'invente rien,
strictement rien,n se contentant de reproduire des schémas, des atmosphères
sculptés avant lui par tous les masochistes finlandais et notamment Shape Of
Despair et Tyranny. Dans n'importe quel autre genre, cet allégeance trop
évidentes aux travaux de ses aînés aurait été fâcheuse. Mais le funeral doom
est une chapelle qui échappe à ce genre d'argument car il n'est pas une
question de raison, d'innovation, mais de vécu, de sensation. C'est justement
pour cette raison que Megaliths
Of The Abyss est une réussite
admirable. Tout a été dit avant lui et pourtant la magie continue d'opérer car
il est bien difficile, quand on aime le style, de ne pas succomber à la beauté
ténébreuse que ces longues plages monotones irradie. Ecoutez ces perles que sont
"Megaliths Of The Abyss", "Mollusk", "Oroboros"
et "A Name Write In Water"... Elles sécrètent une tristesse qui
confine à l'abandon et dont le vecteur sont ces riffs, ces accords qui pleurent
toute la misère d'une vie constamment au bord du naufrage, tandis que les
claviers, omniprésents, tissent un toile sépulcrale d'où jailli l'émotion. Chaque
titre est une lancinante progression vers les limbes, vers une fin programmée,
à l'image de ses sons proches du glas qui rythment le délitement du désespéré
"Oroboros". Le comble de la catatonie dépressive est atteint lors du
tragique "A Name Write In Water", douloureuse plainte qui donne
l'impression de ne jamais vouloir mourir ; elle égrène des notes qui abritent
tout le malheur du monde, véritable cathédrale de souffrance aux arc-boutants
enracinés dans une inexorabilité absolue. Vous l'aurez compris, je ne peux que
recommander cet album à tous les amoureux des musiques suicidaires et à ceux
qui cherchent tel un graal inaccessible la bande-son la plus mélancolique qui
soit. Si vous êtes en quête d'une corde pour vous pendre, nul doute alors que
vous trouviez dans ce Megaliths
Of The Abyss l'instrument
adéquat. Celui-ci est pourtant tellement beau et profond pour qui y sera
sensible. (cT2009)
Funeral Doom | 43:45 | Black Plague Records
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