Hordes

jeudi 27 février 2014

Chronique : Cynic - Kindly Bent To Free Us (2014)




Commençons, si vous le voulez bien et une fois n'est pas coutume, pas les choses qui fâchent. En effet, nous aurions tant aimé ne dire que du bien de "Kindly Bent To Free Us". Parce que, unique et visionnaire, Cynic fait partie de ces formations cultes qui ne sont pas tout à fait comme les autres. Parce que "Focus", dont on a longtemps cru qu'il resterait sa seule trace de vie, demeure encore aujourd'hui, vingt ans après sa conception, un ovni sonore qui ne ressemble à rien de connu, mètre-étalon de ce qu'on nommait alors le Techno death. Parce qu'en 2008 "Traced In Air", son tardif successeur, bien qu'à des années-lumière de son aîné, en s'inscrivant en réalité davantage dans le sillage des opus de Aghora ou de Gordian Knot, terrains de jeu de certains de ses auteurs, a su totalement repenser le son et l'identité du groupe. Parce que six ans, c'est long, même avec des EP pour patienter, surtout lorsque ceux-ci soulèvent plus de questions qu'ils n'en résolvent comme ce fut le cas de "Re-Traced" puis de "Carbon-Based Anatomy".  Parce que enfin, Paul Masvidal et les deux Sean, Reinert et Malone, sont ces musiciens d'exception dont chaque nouvel album rime avec aventure. Parce que. Si on sait depuis longtemps que "Focus" n'aura jamais vraiment de successeur tel que ses laudateurs le souhaitent, les Américains ayant depuis longtemps largué les amarres du death metal, on découvre aujourd'hui que "Traced In Air" n'en aura pas non plus. Bien sûr, le gouffre qui le sépare de son prédécesseur n'est pas aussi vertigineux que celui qui existe entre les deux premiers albums. Le fait est que "Kindly Bent To Free Us" se révèle aussi unique que ses aînés, à sa manière, élégante et aérienne. En cela, la patte du groupe s'avère reconnaissable entre mille, signature qu'incarne à la fois cette écriture ciselée comme un travail d'orfèvrerie, un attachement pour les formats courts intacts et surtout le jeu de chacun des protagonistes. A ce titre, le disque fait plus que jamais la part belle aux lignes de Sean Malone dont la basse bouffe tout l'espace, ce dont on ne se plaindra pas, témoin par exemple 'True Hallucination Speak'. Avec l'assurance tranquille de virtuoses qui n'ont plus rien à prouver et sont en parfaite en osmose, on sent que les trois compères se sont fait plaisir, plaisir qu'on aurait donc aimé partager. Ce n'est pas tout à fait le cas, même après de nombreuses écoutes, condition sine et qua none à sa totale défloraison afin de débusquer tous les trésors (forcément) cachés se nichant dans le coeur de ces compositions aussi légères que denses. L'oeuvre déçoit au final quelque peu. Peut-être en attendions-nous trop ? La performance instrumentale n'est bien entendu pas en cause. Mais écoute-on un album pour ses seules qualités techniques ? Avares en émotion, celles-ci paraissent du coup bien vides. Là réside la principale faiblesse de "Kindly Bent To Free Us" qui peine à nous émouvoir sinon à nous emmener avec lui pour ce dépaysant voyage tant espéré mais à demi- réussi. Ceci étant, l'album, s'il n'échappe pas toujours à l'ennui ('Infinite Shapes') n'est pas sans beauté, une beauté un peu triste qui ourle de cette partition pleine de finesse, à l'image des  'Kindly Bent To Free Us' ou 'Holy Fallout' notamment. Plus que jamais, Cynic demeure ce projet à part qui évolue avec intelligence vers des contrées désormais plus atmosphériques, graal insaisissable entre progressif et rock fusion qui ne se dévoile que peu à peu. Picoré, ce troisième album peut paraître décevant, dans sa globalité intime, il recèle au final nombre de joyaux qu'on ne distingue pas immédiatement. Aérien et technique, il touche à l'impression plus qu'à la réalité. [Music Waves | 2014]

Progressive Metal | Season Of Mist | 41:52



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