Un visuel sobre qui tranche avec les
pochettes habituellement privilégiées dans le genre, visuel d'une blancheur
virginale que seuls quelques aplats grisés viennent perturber, polluer, salir. The June Frost. Un titre
révélateur de cette ambivalence. Cet album de Mournful Congregation, l'une des
figures tutélaires du funeral doom death, est ainsi entièrement écartelé entre
obscurité et lumière, blanc et noir, la chaleur et le froid, jour et nuit...
C'est une oeuvre en clair-obscur, zébrée de (rares) fissures lumineuses. Cette
longue reptation commence avec une introduction d'une sombre beauté funéraire,
"Solemn Strickes The Funeral Chimes" qu'ouvre le glas qui sonne.
L'ambiance y est plombée, ce que renforce encore davantage la présence d'un
orgue qui vient la souligner mais un solo prisonnier d'une gangue de tristesse
beau à en pleurer surgit et contribue à conférer à cette entame les teintes
d'un désespoir absolu. D'entrée, on sait que The
June Frost sera une ode
douloureuse et belle à la fois. Le léthargique "White Cold Wrath Burnt
Frozen Blood" en constitue la plus parfaite démonstration. Après de longs
et pétrifiés préliminaires, la complainte avance au rythme d'une limace sous
valium. Les guitares sont comme des coups de boutoir lancinants qui vous
engourdissent, vous écrasent d'une faute que l'on ne peut pardonner, cependant
que le chant y est caverneux et profond. Ces premières minutes sont figées dans
un monolithisme minéral mais les Australiens
maîtrisent la science de la progression et cette plainte est heureusement
bercée par les pleurs de guitares sublimes, avant de se terminer dans un
linceul émotionnel qui l'est tout autant. Déjà connu, grâce au split avec Stone
Wings, "Descent Of The Flames" se veut, tout comme le bien nommé et
agonisant "A Slow March To The Burial", une plongée sans retour dans
les arcanes de la terre et dont la longueur plus courte n'empêche nullement de
prendre des allures de procession funèbre. Ni lumière ni issue. The June
Frost est toutefois éclairé,
quand bien même il s'agit d'un moment de pure mélancolie automnale, par cette
pause salvatrice dans cette inexorable mise en bière, qu'est le très beau
morceau éponyme, instrumental d'une sobriété touchante qui coupe l'album en
deux. Car ce qui suit révèle une noirceur sans fond, malgré la beauté
qu'irradie par exemple "Suicide Choir" quand il libère des instants
de grâce immenses et émouvants, dérive sentencieuse et infinie au beau milieu
d'un océan désespéré. The June
Frost évoque ces enterrements
enchaînés à la neige et à la brume dont on suit le cortège funeste
silencieusement. Tout l'art de Mournful Congregation réside dans cette beauté
tragique sculptée à l'aide de riffs en forme de burin et avec ce nouvel opus,
il est parvenu à atteindre une expression d'une pureté admirable. (cT2009)
Funeral Doom Death | 60:06 | Weird Truth Productions
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