Les étiquettes, c'est chiant.
Ca gratte et en plus, alors que c'est censé vous individualiser, ça ne fait au
contraire que vous enfermer dans une case dont vous restez prisonniers ! The
Atlas Moth a écopé de l'étiquette "sludge doom US". Bien. Sauf que
les Américains sont aussi à l'étroit dans ce créneau bien embouteillé que Guy
Carlier dans une Fiat 500 ! Certes, le collectif aligne comme des pinces à
linge sur un fil la plupart des invariants propres au genre (vocaux vindicatifs
décapés avec du Destop, riffs pachydermiques qui dressent une verge dure et
tendue, tempo coulé dans une flaque de mazout...) mais il sait surtout dépasser
ce style, le transcender. Ce qu'il réussit en le faisant copuler avec des
ingrédients empruntés à d'autres. Bref, The Atlas Moth ne reste jamais inféodé
aux Tables de la loi, il pense par lui-même. Il est libre. Démonstration avec
sa première éjaculation de soufre, A Glorified Piece Of Blue Sky. Dès le titre
d'ouverture que l'on prend tout d'abord pour un instrumental, on comprend que
l'on n'a pas ici à faire à de simples suiveurs. Bruitiste, ambient, "A
Night In Venus' Arms" prend peu à peu forme, se déploie avec des guitares
suintant la mélancolie par toutes les cordes et un chant aux tessitures
variées. Suit le morceau éponyme qui lui aussi sait changer en cours de route
de direction. Après une première partie très sludge, il se pare ensuite de
couleurs plus post rock (à l'instar aussi du décharné "Jump Room To
Orion"). "Grey Wolves" est propulsé par un groove quasi
hypnotique, tandis que le fabuleux "Our Sun, Our Saviour", cosmique à
souhait, ouvre les cuisses vers une intimité franchement psychédélique,
cependant que ses riffs se voilent d'une pellicule atmosphérique bien que
goudronneuse. Chaque titre secrète des richesses. Loin du monolithisme souvent
de mise dans le sludge doom (ce n'est pas une critique), ils savent combiner
divers éléments, diverses couches qu'ils empilent pour former un tout cohérent
et personnel. Ainsi, ces Ricains n'hésitent pas à tutoyer le pur heavy metal,
comme le démontrent les harmonies émaillant le tellurique "One Amongst The
Wheat Fields", dont le final est englué dans une épaisse couche de
désespoir. Le groupe accède à l'orgasme lors de la pièce terminale longue de
dix minutes, "... Leads To A Lifetime On Mercury", qui en synthétise
toutes les facettes : riffs ruisselant de tristesse, chant qui explose son
mal-être ainsi que cette façon de mélanger les positions et les corps du post
rock, du doom, du heavy et de l'ambient pour son final, avec un brio rare. Avec
une bonne dose de lubrifiant aussi. Nouveau venu, The Atlas Moth a du
potentiel, des idées et de la réussite ce qui lui permet d'accoucher d'un galop
d'essai certainement annonciateur de plus grandes choses encore. Une bonne
découverte en définitive, bien supérieure à ce que l'on aurait pu croire de
prime abord. Ah, ces étiquettes.... (cT2009)
Atmospheric Sludge Metal | 49:57 | Candlelight Records
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