Lettre à Anathema. Les mecs, je vous aime. Je vous ai
découvert avec votre Eternity et depuis, je vous suis resté fidèle, témoin
anonyme de votre évolution vers une musique de plus en plus atmosphérique bien
que toujours aussi mélancolique et touchante. Il n’en demeure pas moins que
vous commencez à me briser mes (pas si) vieilles roubignolles, comme disait
Jacques Brel, avec le mépris que vous affichez à l’endroit de vos débuts dont
vous n’avez pourtant pas à avoir honte, bien au contraire. A longueur d’interviews,
vous ne cessez de vomir sur vos premières œuvres qui ne semblent plus trouver
grâce à vos yeux. Cette attitude est insultante pour tous les fans que vous
avez alors bouleversé avec The Crestfallen, Serenades, The Silent Enigma et
bien entendu Eternity qui amorçait déjà le virage musical à venir. Vous avez le
droit d’évoluer mais pas celui de renier vos origines. Je vous en veux pour
tout ça. Malgré tout, j’ai acheté (oui, il existe encore quelques irréductibles
qui achètent des disques !) Hindsight en imaginant qu’il serait votre
pierre tombale dans mon cœur. Je me suis trompé. Oh non pas qu’il soit exempt
de tout reproche – une simple relecture semi-acoustique de certaines
compositions en guise d’album alors que vous n’avez rien publié depuis cinq
ans, c’est un peu léger – mais ce disque contient suffisamment de grands
moments pour séduire et emporter l’adhésion. Vous avez donc choisi de revisiter
neuf titres (plus une nouvelle chanson, « Unchained », pas
désagréable) de votre répertoire récent et de les habiller d’atours décharnés
(guitare acoustique, violon, piano…). Si dans le cas du pourtant très beau
« One Last Goodbye », le résultat ne se révèle pas transcendant car
trop proche de l’original, cette démarche artistique est couronnée de succès avec
le sublime « Fragile Dreams » et
« Inner Silence » (tirés d’Alternative 4). Le poignant
« Angelica » (seul rescapé des débuts) l’est toujours autant tandis
que Hindsight permet de redécouvrir certaines pièces de A Fine Day To Exit (le
douloureux « Temporary Piece ») et de A Natural Disaster (« A
Natural Disaster » et l’immense
« Flying »). Curieusement alors que vos chemins se sont séparés à la
fin des années 90, vous semblez de plus en plus connectés à votre ancien
bassiste Duncan Patterson (qui était en fait bien plus que cela car c’était
bien en lui que résidait l’âme du groupe). D’ailleurs, Vinnie, tu as joué cette
année avec lui dans une petite salle parisienne et il apparaît même sur ce
disque pour tenir une mandoline ( ?). Votre art, à l’instar du sien, est
de plus en plus dépouillé, diaphane, squelettique, mais toujours aussi beau
comme un chat qui dort. Et d’une finesse admirable. Hindsight nous rassure donc
sur la puissance émotionnelle toujours intacte d’Anathema mais ne nous en apprend pas davantage quant à la
teneur du prochain véritable opus du groupe. Il se dit que Steven Wilson
pourrait le produire. Si c’est le cas, on peut en espérer le meilleur… Pour
terminer, un conseil les mecs, vous seriez bien avisés de la fermer un petit peu et de vous
contentez de faire de la musique.
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